Du Bureau des Affaires spatiales des Nations unies
à l’Ocean Space Forum de Monaco…

Par Viviane Le Ray, 7 septembre 2024 à 11:58

Le Monde vu de Sophia

Le 2 juillet dernier, la deuxième édition de l’« Ocean Space Forum » s’est déroulée au Musée océanographique, co-organisée par le Bureau des Affaires spatiales de Monaco, le Centre national d’Études spatiales français (CNES) et l’entreprise du NewSpace Prométhée. L’occasion de mettre en valeur la contribution des technologies spatiales aux enjeux de préservation et de gestion durable des océans et pour la rédaction, de rencontrer Driss El Hadani, directeur adjoint et conseiller principal du Bureau des Nations unies pour les affaires spatiales (UNOOSA).

Monsieur El Hadani, votre présence au Musée océanographique aujourd’hui est, j’imagine, une introduction à ce qui va se passer à Nice en 2025, à savoir la « 3ème Conférence des Nations unies sur l’océan »…


Nous avons souhaité réunir en Principauté les acteurs concernés par le domaine spatial aux fins d’accentuer les coopérations internationales. Plus de 60 % des observations des océans et de la protection marine en effet dépend - pour l’essentiel - des données spatiales. On constate que l’impact économique du spatial est très important dans une diversité de domaines grâce aux observations par satellite : protection des ressources marines, télécommunications, positionnement, collecte d’informations, durabilité de l’activité de l’océan… Et en même temps nous souhaitons accélérer une synergie internationale en termes de coopération.


À l’heure où je vous parle, plus de 20 programmes sont en orbite dans lesquels cette coopération joue un rôle capital. La conception, la mise en œuvre de ces programmes assurent la continuité de l’observation et l’acquisition des données scientifiques. C’est notamment le rôle du Bureau des Affaires spatiales des Nations unies que de faciliter l’accès à ces données d’observation de la terre par un mécanisme de partage que nous avons établi. C’est aussi le rôle du Bureau de développer des compétences dans les pays en développement afin qu’ils soient en capacité d’utiliser et d’exploiter ces paramètres. Le besoin au niveau de ces États est très important en matière de défis environnementaux en lien avec le milieu marin. L’action que nous menons aujourd’hui auprès des pays en développement en termes d’échanges, de mise en place des systèmes d’observation et d’acquisition des résultats répond à des besoins très diversifiés.


Comme par exemple le repérage de la surpêche…


Les utilisations des données venues de l’espace ont une palette très large d’application. On peut établir un état des lieux sur base d’un périmètre géographique très précis, on peut surveiller la pollution marine, la dégradation des zones côtières, et notamment la surpêche préoccupante que vous évoquez.


Les données spatiales permettent aussi un suivi temporel qui permet de mettre en évidence les évolutions et les dynamiques, qu’elles soient dues à des phénomènes naturels ou anthropiques. On peut aussi utiliser les données comme un suivi de protection en temps réel. Un mécanisme d’alerte en somme, pour anticiper des catastrophes qui peuvent être générées soit par des activités humaines, soit par la nature elle-même.


Les prémices de cette surveillance depuis l’espace remontent à quand ?


L’observation satellitaire a été initiée il y a une trentaine d’années, mais depuis, nous avons gravi plusieurs niveaux de perfectionnement. En premier lieu, l’amélioration de la qualité des observations en orbite. Les nouveaux satellites, c’est clair, sont bien plus précis. Ils sont munis de capteurs plus fins et plus variés qui permettent d’observer et de mesurer des paramètres plus diversifiés. Cela ouvre la possibilité d’agir dans la minute pour permettre aux acteurs d’avoir les moyens de gérer ce qui les concerne.


Toute médaille a son revers… Il semblerait que l’espace, trente ans plus tard, souffre de sérieux « embouteillages » !


C’est en effet un nouveau challenge auquel il faut faire face et la continuité de l’observation de la terre par des moyens spatiaux en dépend. Malheureusement, le nombre d’objets mis en orbite s’accroît de façon exponentielle. Conséquence de cette activité spatiale, il y a énormément de débris dans l’espace et c’est un vrai défi pour la durabilité de l’activité de la recherche via l’espace. D’un côté, on a démontré que le spatial est indispensable pour observer la terre et les océans, mais en même temps, il y a urgence à mettre en place des mécanismes internationaux qui réduisent les débris de tous ces objets. Il faut parvenir à une coordination de trafic dans l’espace pour éviter aussi des collisions dommageables par rapport aux observations.


Tout cela pose la question de la durabilité de l’utilisation de l’espace. Une consultation internationale est en cours avec l’ensemble des acteurs - opérateurs étatiques et privés - pour parvenir à un consensus et mettre en place des contrôles pour améliorer le trafic dans l’espace.


Un vaste chantier dont il sera certainement encore question en 2025, à Nice...


Parution magazine N°46 (septembre, octobre, novembre)

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