L’art de traverser les tempêtes…

Par Emmanuel Maumon, 7 septembre 2024 à 11:06

De Tech à tech

Si dès le départ, SeaSatCom a rencontré le succès auprès de la grande plaisance, la Covid et la guerre en Ukraine ont bien failli lui être fatale. L’entreprise a su faire le dos rond avant d’être confrontée à une autre tempête, l’arrivée de Starlink, une innovation de rupture dans le monde de la plaisance. SeaSatCom est parvenu à surfer sur cette nouvelle vague en réinventant son business model. De quoi envisager l’avenir sous les meilleurs auspices.

À ses débuts, SeaSatCom proposait des solutions de communication à bord quasi uniquement à la grande plaisance. Un secteur dans lequel elle s’est rapidement fait une belle place avec son concept de Smart Yacht et son idée de « one-stop-shop ». SeaSatCom innovait alors en apportant l’ensemble des services de communication à bord avec un seul fournisseur, un seul contrat, une seule facture et un seul interlocuteur. Pour son créateur Antoine Perry : « A l’époque, nous étions les premiers à faire cela. Il existait des sociétés spécialisées en radio, d’autres en télévision ou en Inmarsat, mais amener tout d’une seule main, personne ne l’avait fait ».


Un ex-champion de la croissance azuréenne


D’ailleurs le succès ne s’est pas fait attendre et l’activité de SeaSatCom a décollé de manière extrêmement forte car elle répondait à un besoin criant de la grande plaisance. Entre 2007 et 2011, la société a été le champion de la croissance azuréenne avec près de 800 % de croissance en l’espace de cinq ans. À force d’être présent sur les pontons et de discuter avec les capitaines, puis d’imaginer ce qui pourrait leur faciliter la vie, Antoine Perry avait visé juste et tapé dans le mille. Depuis, SeaSatCom cherche toujours à avoir un train d’avance par rapport à ses concurrents.


Après cette folle période de croissance, la société est entrée dans une phase de consolidation en portant ses efforts sur la qualité de ses services et un positionnement premium. Elle s’est appuyée en cela sur son équipe qui lui permet d’être en permanence à l’écoute de ses clients et de répondre, quasiment du tac au tac, à leurs mails, WhatsApp ou SMS. SeaSatCom est revendeur officiel de toutes les prestations qu’elle propose et est en lien direct avec tous ses fournisseurs, sans devoir passer par des intermédiaires. En cas de problème, et il y en a toujours sur ce type de prestations, elle a la main directement.


Premières tempêtes avec la crise du Covid et la guerre en Ukraine


Alors que SeaSatCom avait conforté ses positions de marché sur les services de communication apportés à la grande plaisance, elle a récemment dû affronter de terribles tempêtes. La première avec la crise du Covid qui, pour Antoine Perry, a fait passer la crise financière de 2008 pour de la rigolade. Il explique : « Durant la pandémie, les yachts ont eu l’interdiction de naviguer. Ne sortant plus du port, ils ont résilié tous leurs abonnements, faisant ainsi perdre à SeaSatCom 40 % de son chiffre d’affaires en l’espace de quelques mois ». Heureusement, la société avait alors des bases solides et une trésorerie bien fournie. Elle avait aussi anticipé en signant un PGE pour lui permettre de traverser cette bourrasque.


Mais alors qu’elle pensait pouvoir commencer à souffler, c’est la guerre en Ukraine, avec comme conséquence immédiate la quasi-disparition des clientèles russe et ukrainienne. Interdits de séjour, les Russes n’étaient plus là. Autres bons clients du yachting, les Ukrainiens non plus. C’est pratiquement 20 % supplémentaires du chiffre d’affaires de SeaSatCom qui s’est ainsi évaporé. De quoi sérieusement menacer son existence. Pour couronner le tout, une nouvelle tempête s’annonce avec l’arrivée de Starlink dans le monde maritime.


Autre tempête avec l’arrivée de Starlink


Avec sa constellation de satellites, Starlink introduit une véritable innovation de rupture dans la communication à bord des navires. Pour Antoine Perry : « Avant Starlink, vous n’aviez pas d’internet à haut débit sur les bateaux par satellite. Vous deviez acheter une antenne de près de 50 000 euros et souscrire un abonnement de 5 000 euros/mois pour n’avoir que du 4 mégabits/secondes. Aujourd‘hui, avec une antenne Starlink de 5 000 euros, installation comprise, et un abonnement de 1 300 euros/mois, vous recevez du 200 mégabits/secondes. Le prix d’entrée a donc été divisé par dix et vous amenez du haut débit partout sur le bateau. »


Pour SeaSatCom, l’arrivée de Starlink a signifié dans un premier temps une perte de chiffre d’affaires puisque l’équipement se vend moins cher et que les marges sont réduites. Mais à long terme, Starlink lui a ouvert de nouveaux horizons. Elle offre en effet d’énormes possibilités avec de nouveaux services comme la télé par internet, la visioconférence ou la téléphonie via IP. De plus, de nombreux bateaux qui ne s’équipaient pas en raison du coût de l’antenne et du prix de l’abonnement sautent aujourd’hui le pas et de nombreux bateaux de 20 à 30 mètres commencent à s’équiper.


L’art du rebond pour surfer sur la vague Starlink


Alors que l’arrivée de Starlink aurait pu signifier la disparition de SeaSatCom, cette dernière s’en est au contraire servi pour rebondir. Antoine Perry s’est ainsi battu pour devenir revendeur officiel. Un long combat de plusieurs mois avec de nombreux allers-retours car Starlink n’est pas une société simple avec laquelle travailler. Mais au bout du compte, parce qu’une nouvelle fois elle a pris le virage avant les autres, SeaSatCom est aujourd’hui le seul revendeur officiel Starlink de la grande Côte d’Azur, de Marseille jusqu’à Gênes.


Derrière, SeaSatCom a également réinventé son business model en ayant désormais l’opportunité de proposer de nouveaux services. Ainsi, elle met désormais en avant My Canal et est en train de travailler pour fournir Sky sur internet ainsi que sur des solutions de voix sur IP. Elle a également complété son dispositif avec OneWeb afin de couvrir des zones dans lesquelles les bateaux naviguent mais où Starlink ne fonctionne pas, comme en Turquie par exemple.


SeaSatCom travaille aussi beaucoup sur la qualité du réseau local, indispensable pour que les communications à bord des navires fonctionnent bien. Elle est notamment devenue Gold Partner Peplink et développe des solutions que l’on peut mettre derrière comme la cybersécurité, le dépannage à distance ou la gestion de la bande passante pour les équipages. Toute une série de services qui n’existaient pas auparavant et qu’elle peut désormais proposer à ses clients.


Nouveau business model et diversification des cibles


La réinvention du business model de SeaSatCom s’accompagne également par une diversification de ses cibles. Même si elle ne néglige pas la grande plaisance, un secteur où elle est désormais puissante et bien connue, SeaSatCom cherche aujourd’hui à s’ouvrir à la moyenne plaisance et a déjà de nombreux dossiers en cours. Depuis l’année dernière, elle est fournisseur de Naval Group pour lequel elle a déjà équipé un bateau. Une grande victoire pour Antoine Perry pour qui « il n’est pas évident pour une société de la taille de SeaSatCom d’entrer chez Naval Group. Cela a demandé beaucoup d’énergie et de travail. » Sans viser de grandes quantités, la société espère recevoir deux ou trois commandes par an.


Avoir obtenu la confiance de Naval Group est un atout certain pour pénétrer un autre marché, celui de la marine marchande. Un filon que SeaSatCom compte bien explorer en visant principalement les petites compagnies de 20 bateaux maximum. Un atout aussi pour toucher d’autres compagnies de l’industrie qui utilise des plateformes offshore.


Désormais, SeaSatCom vise tout ce qui se trouve sur la mer. Outre les navires, plateformes offshore, champs éoliens, mais aussi drones ou bouées communicantes sur lesquelles la société travaille déjà. Les innovations de rupture comme Starlink montrent que la communication sur l’eau ne va aller qu’en s’amplifiant et que de nouveaux marchés sont à prendre. SeaSatCom entend bien s’y employer en adoptant une vision qui dépasse celle des trois mois qui viennent. Son avenir s’annonce donc plutôt sous de bien beaux auspices.

Parution magazine N°46 (septembre, octobre, novembre)

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