TSE,
leader français de l’agrivoltaïsme
Énergivores
À Amance, les engins agricoles circulent sans problème sous la canopée © TSE
Émanation de deux acteurs sophipolitains de la première génération du solaire, TSE a été fondée en 2012. Elle s’est rapidement développée sur deux axes : les centrales solaires au sol, notamment sur les terrains dégradés, et l’agrivoltaïsme qui fait cohabiter de la production d’énergie solaire avec de la production agricole. Rencontre avec son directeur général délégué au développement, Bertrand Drouot L’Hermine, pour évoquer ces différentes activités et nous parler des ambitions de TSE qui entend bien devenir l’un des leaders du solaire en France.
Bertrand Drouot L’Hermine, vous construisez des centrales solaires, quelles solutions proposez-vous et à qui s’adressent-elles ?
Le développement et la construction d‘une centrale solaire dure près de cinq ans, depuis la localisation d’un terrain apte à l’accueillir jusqu’à son raccordement, en passant par la préparation de l’instruction du permis de construire et la recherche d’un financement. Aujourd’hui, TSE a deux axes principaux de développement : les centrales solaires sur terrains dégradés et l’agrivoltaïsme. Actuellement, nous travaillons beaucoup de projets sur les activités agricoles avec des projets en canopées, en ombrières de culture, ou en élevage. Nous avons également un pôle Convergence qui traite de sujets de multi énergies sur des sites industriels. Avec la société Lhyfe, nous allons ainsi déployer sur l’ancien site des Fonderies du Poitou de la production d’énergie solaire et d’hydrogène.
Quelles sont vos réalisations les plus emblématiques ?
Nous avons construit à peu près 500 mégawatts de production d’énergie solaire et nous travaillons aujourd’hui sur un portefeuille de projets d’un peu plus de 2 Gigawatts de puissance. Parmi nos réalisations les plus emblématiques figure notamment une centrale raccordée en 2021 à Marville dans la Meuse sur une ancienne base aérienne de l’OTAN. Cette centrale comporte beaucoup d’innovations, notamment en matière de biodiversité, et représente la quintessence de ce qu’il est possible de faire sur un terrain dégradé. Dans le domaine de l’agrivoltaïsme, nous avons inauguré récemment deux canopées, à Brouchy dans la Somme et à Amance en Haute-Saône. Deux systèmes qui permettent de déployer la production d’énergie solaire par-dessus les cultures, sur tous types de grandes cultures : blé, maïs, orge, soja, etc…
L’agrivoltaïsme, un secteur en devenir
En matière d’agrivoltaïsme, quels sont les bénéfices que tirent les agriculteurs de l’installation de vos centrales solaires ?
Nos solutions sont conçues pour apporter un service à l’agriculture. Par exemple, à Brouchy et à Amance, elles protègent des aléas climatiques. Quand la grêle tombe, nous mettons les panneaux à l’horizontale et ils couvrent près de 45 % du champ en dessous en assurant une vraie protection. L’effet canopée permet aussi de réguler les températures à la baisse lors des pics de chaleur importants. Grâce à un système de trackers, qui fait tourner les panneaux en suivant la course du soleil, nos panneaux créent un ombrage qui limite l’évapotranspiration et donc la consommation d’eau. Une consommation qui représente l’un des enjeux majeurs du monde agricole dans les prochaines années.
Vous avez développé une ombrière photovoltaïque adaptée aux grandes cultures. Quelles sont les caractéristiques de cette canopée agricole ?
Nous voulions un système déployable très massivement sur les cultures en France, et ce sans changer les pratiques agricoles. Il devait donc permettre de faire passer dessous la quasi-totalité des engins agricoles, mais aussi d’être géré dans une logique de rotation de cultures. Nous avons donc travaillé sur la façon d’optimiser le rendement agricole en fonction des cultures que l’agriculteur a l’habitude de pratiquer. La canopée est un système assez simple avec des poteaux et des câbles pour soutenir les panneaux. Dans un sens, nous avons un espacement de 27 mètres entre les poteaux, qui va être l’axe de travail de l’agriculteur, et un point bas à 5 mètres. Cela autorise le déploiement de grandes cultures, avec des rotations de cultures une à deux fois par an, ce qui facilite par ailleurs la maintenance du système.
A Brouchy, cette canopée est doublée d’un système d’irrigation intelligent. Cela représente-t-il une solution d’avenir en ces temps de sécheresse ?
C’est une première mondiale d’avoir un système déployable sur grande culture et qui intègre une brique irrigation. Il s’agit d’une innovation majeure car la gestion de l’eau sera un enjeu critique du monde agricole dans les prochaines années. Bardés de capteurs, nos systèmes offrent une parfaite connaissance de chaque sous-ensemble de la parcelle en termes d’hydrométrie et de croissance des végétaux. Il est donc possible d’irriguer la parcelle très finement, par petits blocs et non de manière uniforme, mais aussi aux moments où l’évaporation est minimale, ce qui limite fortement la déperdition de l’eau.
300 millions d’euros de levées de fonds
Pour accélérer le développement de TSE, vous avez réalisé une levée de fonds de 130 M€ en 2023. Cela a-t-il été facile de trouver des partenaires financiers ?
Avant même cette levée de fonds, nous avions déjà levé et sécurisé un peu plus que ce montant en financement. Au final, TSE aura levé 300 millions d’euros. Cela n’a pas été facile dans une période de remontée des taux d’intérêt qui affecte le monde du financement. Pour autant, nous sommes parvenus à agréger le plus beau tour de table qu’on puisse rêver de constituer dans notre métier. En effet, nous avons fait entrer à notre capital trois acteurs : Eurazeo, un des plus beaux fonds d’investissement institutionnels français ; le Crédit Agricole, le premier financeur du monde agricole, et la Caisse des Dépôts, le premier financeur des collectivités territoriales.
C’est un signe de confiance dans votre avenir. Quelles sont vos perspectives de développement à moyen terme ?
C’est effectivement un énorme signe de confiance qui valide tout ce que nous avons réalisé jusqu’à présent. Chez TSE, nous avons en fait vécu un peu cachés pendant cinq ans afin de pouvoir constituer un portefeuille de projets très important avant de devenir une cible. Dans le même temps, nous avons travaillé sur des innovations que nous amenons aujourd’hui sur le marché. Nous sommes sortis de terre il y a un an pour devenir désormais un acteur référent sur l’agrivoltaïsme. Nos levées de fonds nous donnent les moyens de dérouler notre feuille de route qui est très ambitieuse. En termes de personnel, depuis trois ans nous avons doublé nos effectifs chaque année pour arriver aujourd’hui à 250 salariés. Bon nombre de nos projets en portefeuille arrivant à maturité, nous envisageons de recruter encore une centaine de personnes dans les dix-huit mois qui viennent. Nous sommes déjà un acteur majeur de l’agrivoltaïsme, mais notre ambition est d’en être le leader assez rapidement.
Le solaire pour faire face à l’augmentation de la demande d’énergie
Dans les années à venir, la demande d’électricité va considérablement augmenter et le solaire apparaît comme l’une des sources d’énergie les plus aptes à y faire face. L’industrie du solaire est-elle capable de relever ce défi ?
Aujourd’hui, le développement de projets solaires est un métier de petits acteurs agiles, au cœur des territoires et avec une vraie capacité d’innovation. Dans les dernières années, le secteur a connu un énorme mouvement de consolidation avec le rachat de beaucoup de sociétés par EDF ou Total. En fait, nous avons besoin qu’il y ait six à huit acteurs crédibles, d’excellente qualité dans le déploiement et la gestion opérationnelle de projets dans le solaire. Nous, on en sera clairement un. Il en existe quelques-uns qui se sont construits sur des marchés de niche, puis progressivement essayent d’élargir leur palette. Nous avons besoin que ces acteurs-là émergent.
Le siège social de TSE est basé à Sophia Antipolis. Est-ce que cela vous amène des projets particuliers dans notre région ?
Nous avons un projet en cours de développement sur la commune de Valbonne. Il s’agit de la réhabilitation de l’ancienne décharge sauvage du Trou de Béget. Même si c’est un petit projet, nous n’avions pas le droit de ne pas le prendre car il est emblématique et se trouve sur la commune de notre siège social. Pour le reste, le développement du solaire dans les Alpes-Maritimes demeure assez marginal car c’est un territoire avec des enjeux fonciers extrêmes. Aujourd’hui, le déploiement de TSE est totalement national, mais nous sommes fiers de pouvoir faire bénéficier le département des retombées liées à notre développement et à la création de valeur qu’il engendre.
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